Le poids des influenceurs ne cesse de grandir sur Instagram, où des lieux fragiles sont plébiscités entraînant une surfréquentation insoluble. Certains ont pourtant une éthique.
« C’était déjà terrible, c’est devenu infernal, insensé et nous n’avons pas de moyens pour lutter contre ce phénomène. »
Catherine Ferrière est maire de Bouquet, dans le Gard, près d’Alès, commune paisible de 250 âmes qui recèle un trésor : les cascades d’aiguières, un lieu de randonnée sauvage, paradisiaque avec ses vasques d’eau émeraude… Et envahi par le monde et les détritus.
Le surtourisme y exprime toutes ses vicissitudes boosté par le phénomène des influenceurs qui, via Instragram principalement, multiplient images et vidéos de ce lieu enchanteur.
« Je vous donne toutes les infos », lance par exemple une influenceuse qui cumule des dizaines de milliers de vues. Une famille qui sillonne la France en camping-car se vante, elle, de montrer les Aiguières, « un endroit tenu quasi secret, nous avons décidé de partager cette pépite de la nature », disent-ils, dans une vidéo visionnée des centaines de milliers de fois.
« Nous, on récolte les problèmes »
« Ces gens se font plaisir, ils sont contents d’être suivis, mais nous on récolte les problèmes », déplore Catherine Ferrière. Et ce n’est pas une posture de reboussier cévenol.
Les curieux n’hésitent pas à tracer de nouveaux chemins dans la nature, suivis par d’autres, abîmant la faune et la flore : « des plantes et des espèces comme certains batraciens ont disparu », indique l’élue.
Surtout, elle a « la hantise », qu’un feu se déclare à cause d’une grillade au bord de l’eau. Sans compter ces visiteurs mal équipés qui se retrouvent en difficulté : « encore récemment, des jeunes femmes ont été secourues par les pompiers, elles n’arrivaient pas à sortir des gorges. »
La pandémie a marqué un tournant avec l’explosion de l’utilisation des réseaux sociaux et ce double phénomène. D’un côté, des influenceurs qui veulent de grosses audiences pour ensuite vivre de leurs voyages via les offices de tourisme. Et les suiveurs, eux, rêvent de prendre en photo ou vidéo ce qu’ils ont vu sur Instagram.
« Instagram décide de nos vacances, c’est le premier Tour opérateur »
« Tout le monde prend le même cliché, l’engouement est énorme avec des impacts écologiques certains. Du coup ça crée une uniformisation des voyages » décrypte Amélie Deloche, cofondatrice du collectif « Paye ton influence », qui, sur les réseaux sociaux, sensibilise sur les questions climatiques.
« Les gens choisissent leur destination pour faire la fameuse photo pour dire ensuite qu’ils y sont allés en la postant… Sur les réseaux sociaux. Des tendances sont créées et le phénomène s’amplifie. Instagram est devenu le premier tour-opérateur, il décide de nos vacances. »
Guillaume Payen est justement un de ces influenceurs “voyage” en Occitanie. Après trois années en Ariège, il est désormais basé à Montpellier et propose des randonnées avec succès. Au printemps, sa vidéo au ravin des Arcs, haut – lieu de balade avec rivière dans l’Hérault, cumule 4,5 millions de vues…
Il défend pourtant une éthique : « je valorise les transports de la région, les cars Lio par exemple pour aller au ravin des Arcs. J’en parle hors saison et les petits endroits de baignade en Occitanie, je ne les filme pas », indique-t-il.
« Faire sortir les gens plutôt qu’ils soient devant leur téléphone »
Mieux. Pour lui, faire découvrir les beaux coins à cette vertu d’inciter au plein air : « ce sont surtout des 18-35 ans qui me suivent. Je trouve ça chouette de faire sortir les gens de chez eux, les inciter à randonner ou découvrir un village plutôt qu’ils soient plantés sur leur téléphone. »
La rue du Bras de Fer, au cœur de Montpellier, est la plus immortalisée sur les réseaux et la vidéo réalisée par Isabelle Iveta, Tchèque installée dans l’Hérault, a cumulé 500 000 vues. Elle aussi cartonne avec, par exemple, les sept plus belles cascades d’Occitanie, mais les commentaires acides de ceux qui lui reprochent de révéler ces endroits l’interpellent.
« Les randonnées faciles marchent beaucoup, je fais découvrir l’Occitanie moins connue que la Côte d’Azur, la beauté de la région. Je peux comprendre certaines réactions mais pas l’agressivité » regrette-t-elle. « Je fais en sort que les gens soient respectueux de la nature. »
Comment lutter contre les dérives ? A Bouquet, la mairie n’a pas les moyens de payer des agents verbalisateurs. Les élus seraient favorables à fermer l’accès au site. Si le risque feu de forêt menace, Catherine Ferrière prendra un arrêté d’interdiction, comme elle a pu le faire. Elle s’interroge sur une possible communication négative : en trois mots, “ne venez pas”.
« Promouvoir des endroits où il y a trop de monde, à quoi ça sert ? »
À la limite du Gard et de l’Hérault, les cascades de la Vis connaissent cette même surfréquentation et le maire de Saint-Laurent-le-Minier pratique déjà cette contre-attaque, souhaitant que l’on ne parle surtout pas de l’endroit, ni en bien, ni en mal.
« Sur une année, la cascade, très photogénique, c’est trois millions de recherche sur internet, une fois et demie plus que le cirque de Navacelles », soupire Bruno Beltoise, qui a dû mettre un parking payant et dissuasif – 10 € – embaucher des agents, mis des feux tricolores…
Il éconduit les influenceurs, a interdit les drones et le rappelle avec lucidité :« Il faut que les gens se rendent compte que les espaces naturels ne sont pas en libre accès, utilisables à l’infini, c’est fragile ! Ils recommandent des sites où les gens viennent mais ne sont pas bien car il y a trop de monde, à quoi ça sert ?. »
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